Alastair Crooke est versé dans les questions philosophiques et théologiques de la religion musulmane ainsi que dans la culture philosophique des Anciens. Grasset en déduit qu’il est trop indépendant pour continuer à faire carrière dans le MI6.
Son texte plonge dans l’ontologie de notre crise de civilisation avec une vision que Grasset nomme quasiment « guénonienne ». C’est le retour des Anciens.
Je note que cela met à mal la vision du progrès linéaire, détruit l’idée de rupture avec le passé et anéantit l’idée de la révolution sociétale LGBT et analogues.
Notre « civilisation » est devenue folle. La prolongation du Russiagate le démontre. Les « modernes » (Lumières, néo-libéraux, etc…) voient leurs constructions fondées qu’ils le nient ou pas sur la rigueur terrible des grandes religions monothéistes s’effondrent. Ce qui laisse de la place à la religion « qui émerge des profondeurs de notre psychisme retrouvant au fond de lui-même les conceptions des Anciens. »
Je souligne deux observations capitales. Les constructions mentales du style messianisme s’effondrent. La sécurité des certitudes associées disparaît. La seconde est la mort de l’idée de l’homme universel. Toute la philosophie et les religions depuis Socrate sont en cours d’implosion.
Cela remet en perspective toutes nos querelles plus ou moins ineptes basées sur ces constructions offrant des certitudes aussi générales que supposées solides.
Je pense que toutes les constructions basées sur la Raison et qui offrent ce genre de certitude oblige leurs porteurs à diviser le monde en « bons et méchants », à n’avoir que des décisions basées sur un logiciel, à refuser tout ce qui entrave l’application de la construction comme une agression injuste, à séparer le monde en celui de paix (celui basé sur la construction quelle qu’en soit sa forme) et celui de la guerre (celui qui se trouve hors de la construction et qui doit être conquis car mauvais). C’est une définition de la guerre de tous contre tous. Le sommet de cette horreur est que cette guerre n’a absolument aucun sens.
Je me souviens du sens du nom « Satan » : le diviseur. Un autre nom de démon est « Lucifer » : le porteur de lumière. Je pense que la lumière à laquelle il est fait référence est la Raison. J’en déduis, logiquement mais sans savoir si cela correspond à une réalité, que Satan et Lucifer se sont alliés pour nous donner ces grandes constructions mentales qui nous « illuminent » si fortement qu’elles nous aveuglent à la présence de la réalité et qui nous divisent en nous et entre nous. Que ces deux entités existent ou pas est ici secondaire. Elles décrivent un fait observable.
Grasset note que le texte de Crooke est simple mais totalement hors Système. Ce dernier s’est totalement perdu dans les droits de l’homme, la laïcité, la tolérance multiethnique, multiculturelle et antiraciste. La description de cet égarement me fait furieusement penser à la masturbation intellectuelle. C’est plaisant mais très solitaire et absolument sans issue. Le retour des Anciens avec leurs conceptions du monde ne peuvent que rendre fous les adorateurs de la masturbation.
Alastair Crooke va au fond du problème qui concerne le BAO et les religions monothéistes.
Il commence par s’étonner, à juste titre, de la folie furieuse déclenchée par la rencontre d’Helsinki et le voyage de Paul Rand à Moscou au Sénat US, dans la presse US, les services de sécurité US et même la population US pour une part notable. Cette fureur est justifiée par des accusations totalement boiteuse comme l’empoisonnement des Skripal par une arme de guerre chimique.
Trump est vécu par les globalistes comme un danger mortel pour leur système. Ils sont prêts à la guerre nucléaire qui les anéantirait plutôt que d’accepter une détente avec la Russie.
La réponse est à chercher dans le psychisme. Lénine, en 1915, a fait tuer 10 millions de ses concitoyens pour détruire la Russie dans son histoire, sa culture, sa religion, son héritage intellectuel et sa politique. Ce meurtre de masse était justifié par la révolution mondiale et le communisme universel.
Je note qu’il apparaissait admissible à cet homme de tuer ses contemporains par millions juste pour mettre en place son idéal.
Crooke cite John Gray qui parle de notre monde comme un lieu emplis des débris de projets utopiques s’assimilant sans problème particulier à des mythes religieux même s’ils se voyaient tous comme laïcs.
Je pense que ce genre de projets utopique se retrouve aussi dans les religions, surtout les monothéistes.
Crooke parle ensuite «Tous ces projets utopiques (meurtriers) découlaient effectivement d'un style de pensée mécanique unique, qui avait évolué en Europe au cours des siècles et qui avait inculqué le sentiment inébranlable de la certitude et de la conviction de chacun, – dans tous les cas, dans la pensée occidentale.«
Je vois ici ce que je nomme Raison des Lumières et les certitudes associées. Elles séparent immédiatement le monde en « bons et méchants », en « monde de la paix » chez les adeptes et « monde de la guerre » chez les non adeptes qui doivent être combattus par tous les moyens même les plus horribles.
La suite du texte confirme totalement mon opinion.
Crooke rejoint l’idée de messianisme que j’ai découverte dans le site eecho.fr Il note que les USA sont le produit d’un tel messianisme. Il note la continuité totale entre Les Lumières et la suite même si elle est troskiste. Il note la nécessité induite de la création d’un homme nouveau soit par la destruction de tout ce qui est irréparable ou la fusion de toutes les identités dans une soumission à la construction utopique. Cette construction doit servir de lien pas les liens que des humains peuvent établir entre eux.
Je note que croire cela possible rend la vision de l’homme à sa naissance comme une pâte vierge sur laquelle tout peut être inscrit ou la vision de la liberté qui permet de choisir son sexe indépendamment de son corps. Elles deviennent même des nécessités pour que l’utopie puisse être réalisée.
Crooke note que le processus de tolérance et la liberté sont devenus leurs antonymes. Ils sont devenus des instruments de répression.
La Russie et Poutine sont l’antithèse de tout cela. Les élites occidentales le savent ou le sentent. Le monothéisme formel (latin) judéo-chrétien est aussi mis en cause par la Russie et Poutine. Ils proposent un monde basé sur des cultures différentes, autonomes et souveraines. Cela fonde une base de collaboration et d’échanges harmonieux entre des gens très différents. L’homme au sens spécifique disparaît.
J’ajoute que le pire pour les globalistes est que cette proposition fonctionne. Ils voient leur « modernité » disparaître et être remplacée par un monde ancien qui n’avait jamais vraiment disparu.
C’est un retour vers un être à nouveau « dans le monde et faisant partie du monde ». C’est un retour vers d’anciennes valeurs et d’anciennes notions que les adeptes des Lumières ont combattues farouchement. C’est un retour vers l’insondable et le Delphique (Je ne vois pas ce que c’est). La tension entre ce retour « dans le monde et faisant partie du monde » et le scepticisme radical donnant la certitude de soi des Lumières est insupportable.
La convergence mythique des Lumières rencontre les profondeurs de la psyché humaine qu’elle a nié. Elles reviennent et s’expriment. L’homme n’est pas une pâte vierge que l’on peut manipuler à volonté.
De la lecture de ce texte, je garde une interprétation incroyablement simple et juste de la crise qui touche le monde occidental laïc ainsi que les religions catholiques et musulmanes. Dans ces trois cas, un homme nouveau a été inventé et une lutte féroce a été menée pour imposer cette nouveauté. Les catholiques ont perdu cette guerre à partir de la Réforme protestante, un peu après l’interdiction de toute production théologique par les laïcs. Les laïcs athées et les Protestants ont repris le flambeau mais chaque essai de création de cet homme nouveau a mal fini. Je trouve leur nombre désespérément grand. Leurs morts est énorme. L’Islam dans ses différentes écoles se comprend aussi comme une telle création par la soumission des individus à l’allah du coran qui promet à travers son prophète la venue d’un monde parfait. J’en retire que toutes les constructions mentales, aussi généreuses que rationnelles et vaines ont abouti à des certitudes individuelles permettant à leurs adeptes de diviser le monde en celui de la paix (le leur) et celui de la guerre (celui des non croyants). La guerre qui s’ensuit est totale q éue ce soit au niveau des idées que des armes.
Il en devient légitime de massacrer les opposants, de les opprimer de toutes les façons possibles pour les convertir de force. Vu que la théorie est posée juste, tout échec ne peut que venir d’ennemis de l’intérieur qui ont pollué le « Message » par leurs mauvaises pensées ou leurs mauvaises actions. Vous vous retrouvez en opposant à la seconde où vous voulez simplement survivre aux conséquences ineptes de ces théories. Vu leur nature humaine, elles en ont toutes. Toutes les horreurs deviennent des biens et inversement.
La liberté est la soumission au « Message ». La paix est la guerre à tout ce qui sort du « Message ». Le savoir est l’ignorance de tout ce qui sort du « Message ». Le bien est absolument tout ce qui sert à propager le « Message ». Chaque humain est posé comme adepte du « Message » quelle que soit son opinion. S’il refuse le « Message » c’est qu’il ne l’a pas compris ou qu’il lui a été mal expliqué. Cela me rappelle furieusement plus d’une information qui se range aisément dans un « Message » que je dois adopter ou gare à moi.
Je rejoins Grasset et Crooke dans leur compréhension de la situation.
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